L'impact du Covid-19 sur le franchisage (partie 1)

F. Georges Sayegh, D.S.C., Adm. A., FCMC du Québec et de l’Ontario, est expert-conseil en franchise et transfert de technologie et auteur de 18 livres sur les franchises et les commerces associés. Pour le rejoindre : gsayegh@gsayegh.com; Tél.: (514) 216-8458.
L’épidémie de COVID-19, la maladie causée par le virus a eu des conséquences économiques, politiques et sociales importantes dans le monde entier. Le secteur de la franchise, composé principalement d’entreprises de vente au détail, de services alimentaires, d’éducation et de services aux particuliers et interentreprises, est un exemple d’une industrie qui a été profondément touchée. La pandémie de la COVID-19 est l’un des plus grands défis auxquels le monde moderne a été confronté. Pour ralentir les infections et « aplatir la courbe » de l’épidémie - c’est à- dire réduire le taux de transmission - plusieurs pays ont dû suspendre leurs activités commerciales et adopter la distanciation sociale afin de réduire les contacts physiques de personne à personne. Outre l’impact dévastateur de la pandémie sur de faibles infrastructures du domaine de la santé, la nécessité de prolonger la distance sociale et d’autres politiques d’atténuation a conduit à une crise économique, qui à son tour a eu des effets néfastes sur les taux de chômage. De plus, plusieurs économies dépendent des exportations ; elles sont également affectées par la contraction du commerce international, la chute des prix des matières premières, les dévaluations monétaires et les perturbations de la chaîne d’approvisionnement mondiale.
Partout dans le monde, le COVID-19 a offert aux gouvernements le choix entre la préservation des vies et la capacité du système de santé à faire face à la pandémie et au financement politique visant à atténuer les coûts de la distanciation sociale et de la fermeture des entreprises. La franchise en tant que modèle commercial et social a plusieurs effets économiques et sociaux, tels que la création d’emplois, la modernisation économique et le développement de l’esprit d’équipe en entreprise. Les effets de l’épidémie de COVID-19 sur les autres services et le commerce de détail sont également graves. La construction, la restauration, la mode et la vente au détail sont parmi les secteurs les plus touchés par la pandémie. Le secteur de la franchise est également fortement impacté, avec des conséquences sur les activités commerciales et l’intégrité du système de franchise. La crise crée également des défis supplémentaires dans la dynamique entre franchiseurs et franchisés. En réponse à ces défis, le gouvernement canadien a adopté certaines mesures pour atténuer l’impact de la crise sur
l’économie. Les principales dispositions comprennent des mesures fiscales directes et indirectes, des mesures liées à l’emploi et une relance économique. Plusieurs webinaires et tables rondes ont été organisés en ligne ; ces réunions étaient composés de plusieurs banquiers, conseillers en management spécialisés dans le domaine de la franchise, juristes, franchiseurs ainsi que des franchisés. Les discussions portaient sur les stratégies adoptées par les entreprises ainsi que les perspectives d’avenir. D’autres touchaient les secteurs de la restauration, de l’éducation, de la vente au détail et des services interentreprises. Dans un autre ordre d’idées, des études à cet égard ont été publiées par la WFC, IFA, FASA et des firmes telles que Deloitte, PWC, pour ne nommer que celles-là, dont nous passons ici en revue les principales idées :
Les premières touchent les soins d’urgences
Les franchiseurs et les franchisés ont dû fermer les portes de leurs magasins à la fin du mois de mars. En général, les premières mesures qu’ils ont prises ont été de réviser
leurs budgets et de travailler avec leurs employés. L’une des principales préoccupations était de trouver des moyens de préserver leur trésorerie, en réduisant les coûts et en maintenant au moins une partie de leurs revenus par des canaux alternatifs. Les chaînes de franchise ont commencé par réduire ou éliminer toutes les dépenses non essentielles telles que les services de conseil, les services de communication, les réparations de magasin et l’entretien. Plusieurs entreprises ont décidé de mettre fin aux contrats d’intérim et d’expérience de travail, tandis que les salariés permanents étaient encouragés à bénéficier des programmes d’incitatifs offerts par le gouvernement du Canada. Après l’introduction des mesures d’isolement, les entreprises de franchise ont entamé une suspension temporaire des contrats de travail et une réduction des heures de travail et des salaires, d’autres instaurer des programme de télétravail ou des livraisons à domicile. Les franchiseurs et les franchisés considéraient les licenciements comme un dernier recours. Parallèlement, les franchiseurs et les franchisés ont commencé à solliciter des lignes de crédit pour financer les salaires. Dans le cadre des mesures de relance économique du gouvernement canadien, les banques privées ont commencé à offrir du crédit selon certaines conditions. Cependant, plusieurs entreprises indépendantes et d’autres réseaux de franchises ont signalé des difficultés à accéder à ces lignes de crédit.
Les relations avec tous les acteurs sont de plus en plus étroites
Les négociations avec les fournisseurs et les bailleurs commerciaux sont essentielles pour garantir une marge de manœuvre fi nancière pour les franchiseurs et leurs franchisés. Ces négociations sont compliquées car malgré le programme d’encouragement du gouvernement, les conditions doivent être respectées entre les bailleurs et les locataires qu’ils soient indépendants ou faisant partie d’un réseau de franchise. Tandis qu’une partie tente de réduire ses dépenses, l’autre n’arrive pas à faire face à ses engagements par manque de revenu. Certains centres commerciaux autorisent l’ouverture des opérations alimentaires pour un service de livraison uniquement. Quant aux fournisseurs de chaînes de franchises, ils sont également fortement touchés par cette crise et négocient avec les réseaux des moyens de survie pouvant avantager les deux parties et leurs réseaux.
L’adaptation de nouvelles stratégies
Les franchiseurs et les franchisés ont pris des mesures pour s’adapter à leurs modèles d’affaires commerciaux afin d’atténuer les effets de la crise. De nombreux concepts ont instaurés d’importants changements à leurs modèles d’affaires avec une rapidité inouïe en adoptant des technologies de pointes leurs assurant un avantage concurrentiel acquis. La crise a intensifié les tendances déjà existantes liées au comportement des consommateurs, à la structure organisationnelle et à la chaîne d’approvisionnement, et a affecté tous les segments des entreprises. Des processus et des technologies auparavant considérés comme expérimentaux, tels que la numérisation, les achats en ligne, la technologie mobile et le marketing omnicanal, sont désormais plus largement mis en oeuvre en raison des défi s posés par la pandémie. Dans le secteur de la restauration, certains restaurants proposent la livraison pour la première fois et le modèle de livraison est considéré comme un modèle qui devra continuer. D’autres chaînes qui travaillaient auparavant avec la livraison augmentent maintenant leur investissement dans ce modèle. Dans le secteur de l’éducation, qui comprend les écoles de langue seconde, le tutorat académique et les instituts de formation, les chaînes de franchise développent rapidement des cours en ligne. Dans des secteurs comme le commerce de détail, les entreprises adoptent également des outils numériques puisque les ventes en ligne grimpent de plus en plus. En outre, les franchiseurs et les franchisés ont commencé à utiliser des outils tels que WhatsApp et Instagram pour les ventes, développent des catalogues virtuels et adaptent leurs routines de distribution, de livraison et de paiement.
Construire des ponts entre franchiseurs et franchisés
La structure du modèle de franchise facilite l’échange d’informations et d’idées qui peuvent contribuer à réduire l’impact négatif de la crise. La collaboration entre franchiseurs et franchisés leur permet de réagir plus rapidement et de prendre des décisions avec plus de certitude. Le franchiseur offre un soutien fi nancier et managérial aux franchisés. D’autre part, les franchisés aident les franchiseurs à identifi er les menaces et les opportunités pour le réseau. Plusieurs chaînes de franchise ont créé des comités de crise qui incluent des franchisés et des membres de différents domaines du franchiseur pour échanger des idées et discuter des mesures. Les comités de crise accélèrent les processus. De plus, les franchiseurs investissent dans la communication avec les franchisés. Ils partagent des informations sur leur entreprise et d’autres sujets, tels que la santé, les soins personnels, la négociation et les conseils juridiques, via des webinaires, des discussions en direct et des podcasts.
Le comportement du client changera
Les franchiseurs estiment que pendant la crise et la période de reprise, les clients seront principalement concernés par les nécessités de base. La confiance des consommateurs s’érode. En raison du grand nombre de travailleurs informels sans revenu, de la suspension des contrats de travail et d’un taux de chômage qui continuera d’augmenter, une partie substantielle de la population canadienne supprime toutes les dépenses non essentielles.
Une autre question sans réponse sur les conséquences de la pandémie est de savoir comment cette crise affectera le comportement des consommateurs à long terme. En raison de la crise sanitaire, les entreprises devront-elles faire face à un consommateur plus soucieux de l’environnement; celui qui est plus préoccupé par la durabilité et les questions sociales.